Galerie Pol Lemétais
Art Brut / Outsider Art
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::: Bruno Buissonnet

 

 

Bruno Buissonnet est né en 1962.

Victime d’un père violent, il est retiré à sa famille et placé à l’orphelinat puis dans des famille d’accueil. Il commence à dessiner à l’adolescence alors qu’il est à l’internat. Ouvrier dans une entreprise de travaux publics, il abandonne le dessin en entrant dans la vie active. En 1994, il est condamné à 20 ans de prison et incarcéré à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré. Dans sa cellule, il va se remettre à dessiner, au stylo, au crayon ou au feutre, sur des feuilles A4 assemblées afin d’obtenir de grands formats.
Après sa sortie de prison, Bruno Buissonnet est transféré en hôpital psychiatrique où il continu sa création. Depuis 5 ans, il a retrouvé son autonomie et vit dans l’Aveyron.

 

Dès la première rencontre avec Bruno Buissonnet et la découverte de ses œuvres, il m’est apparu évident que j’étais en présence d’une création rare, un joyau brut comme on en découvre peu souvent. Des dizaines de dessins réalisés sur des feuilles de papier collées les unes aux autres avec du ruban adhésif et conservés depuis des années, pliés comme des cartes routières dans des classeurs et pochettes pour les conserver. Ils avaient ainsi traversés les années et l’épreuve de la détention, pour former maintenant une œuvre magistrale. Bruno Buissonnet a imaginé et réalisé les plans de son château et les cartes d’un monde idéal à ses yeux, un espace construit contre le réel imparfait. Une utopie avec ses codes, ses valeurs et son organisation hiérarchique. Depuis sa cellule il décrit par le dessin un nouvel univers mental qui lui permet une échappée, une évasion qui devient possible par sa concrétisation sur le papier. Nous entrons ainsi dans son monde, où tous les éléments sont reliés de manière organique, les constructions deviennent vivantes et les cartes se transforment en créatures... une plongée dans sa mythologie personnelle.

Pol Lemétais

 

Tout est histoire de rencontre

En février 2012, j’ai accueilli Bruno Buissonnet dans l’atelier d’art-thérapie que j’animais au centre hospitalier Ste Marie de Rodez. Il s’est présenté avec sous le bras des classeurs dans lesquels des dessins, réalisés sur des feuilles de cantine au format A4, étaient reliés les uns aux autres par du ruban adhésif puis rangés sous pochette plastique.
Parce qu’il m’a autorisé à poser un regard sur son travail, il fut très étonné de l’intérêt que j’y portais. Face à cette œuvre, ma surprise et mon émerveillement passé, je lui ai proposé de l’aider à organiser tous ses dessins en les classant, en les titrant, en les numérotant , en les photographiant, en les réparant et enfin en les protégeant le mieux possible des dégâts involontaires qu’ils subissaient quand ils étaient pliés. Je lui avais installé un espace tranquille et délimité au fond de l’atelier. Il pouvait ainsi dessiner sans être dérangé et dans des conditions quasi similaires à ce qu’il avait connu pendant les 17 ans d’isolement obligatoire. L’espace contraint et réduit n’a pas limité sa créativité ni sa création car il voyait techniquement et symboliquement en grand. C’est pour cela que les feuilles de cantine étaient scotchées les unes à coté des autres, pour ouvrir l’espace. Son lit comme support, il a dessiné des plans, des croquis, comme autant de fondations d’un Château imaginaire qu’il souhaitait se faire construire à la sortie de l’enfermement.
Titulaire d’un CAP de maçon et d’un CAP de menuisier, l’idée de la construction d’un château à du sens mais ce serait ignorer le versant délirant d’une telle réalisation. Il est a noter qu’il se représente lui-même comme roi dans la tour maîtresse du château fort. Son désir de perspective et de penser l’objet en trois dimensions l’a habité tout au long de la réalisation de ses dessins.
D’autres dessins au stylo Bic, qui ne représentent pas le monde réel, sont composés de traits, de lignes, de couleurs dont la précision et la rigueur tendent vers une obsession qui se finalise harmonieusement en une représentation ordonnée et équilibrée fortement affirmée par la pression du stylo sur la feuille. Ces représentations paysagistes, proviennent de ce qu’il nomme « Flashs ». Cette production inconsciente qu’il perçoit depuis son adolescence est devenue une véritable matière à créer, l’obligeant à se mettre rapidement à l’œuvre pour ne pas en perdre le fil, abandonnant alors ce qui était en cours. Ce qui explique un bon nombre de dessins inachevés que j’ai découvert durant les premières séances d’art-thérapie.
La proposition de reprendre les dessins abandonnés parce qu’inachevés lui a permis de se réinscrire dans un mouvement l’obligeant inconsciemment à abandonner l’idée mégalomaniaque de la construction de ce château imaginaire après l’avoir mis en forme graphiquement.
En trente ans de carrière je n’avais encore jamais vu une œuvre réunissant tous les critères que l’on peut attribuer aux artistes d’art brut. Artistes qui comme Bruno, ignorent même le sens de ce terme. Un art authentique, original, sensible, beau, marqué par une précision rigoureuse, une idée obsessionnelle qui se met en forme par nécessité intérieure avec ce qui est sous la main, en l’occurrence, stylo bille et papier de récupération.
Avec l’accord de Monsieur Buissonnet j’ai organisé une rencontre avec le galeriste Pol Lemétais spécialisé en art brut et singulier pour que cette œuvre soit connue et reconnue et que son auteur puisse bénéficier d’une reconnaissance sociale et artistique.

Didier Estival

 

     
   
     

Exposition "La belle évasion"
du 27 janvier au 9 mars 2024